Graphisme présentant un homme tenant la dernière pièce d'un puzzle formant un smartphone géant
Produit & Innovation

Pourquoi vos supers fonctionnalités ne seront probablement jamais utilisées

Publié le : 10 mai 2021
Temps de lecture : 6 minutes

Il est désormais communément admis que la connaissance utilisateur est la clé de voûte de tout produit qui réussit. C’est une croyance ancrée, une volonté affichée à tous les niveaux de l’organisation. Équipes commerciales et marketing, équipes produit et de développement : tous retirent de la satisfaction à vendre, mettre en avant, concevoir et délivrer des fonctionnalités qui vont réellement servir à un utilisateur. 

  • Connaître son utilisateur, c’est s’assurer de développer des solutions qui répondent à son problème. 
  • Comprendre cette problématique, s’en assurer, ne peut être que bénéfique pour la conception et la sélection des fonctionnalités à implémenter. N’est ce pas ? 

Malheureusement, la réalité reflète rarement cette pieuse volonté…

Au tout début de l’histoire d’une start-up, tous les acteurs partagent un même niveau de connaissance de l’utilisateur et de ses problématiques. Les acteurs sont peu nombreux, partagent beaucoup et facilement. Les informations sont connues de tous et impactent les décisions prises pour le produit. 

Mais dès lors que la start-up grandit, les informations se diluent, se segmentent, se cloisonnent même.

Ah bon ? Pourquoi ? Comment ? 

Et bien, chaque équipe doit structurer son activité quotidienne pour rester efficace et faire face à l’augmentation de la charge de travail. Tous définissent unilatéralement des critères de catégorisation des utilisateurs leur permettant de mener à bien leurs tâches. 

Par exemple, les commerciaux découpent le portefeuille client par secteur d’activité, et le Service Client répartit les appels par outil. Le Marketing segmente les clients pour mieux cibler les campagnes d’e-mailing tandis que le Product Manager établit des personas pour rédiger ses User Stories.

Ces segmentations servent les intérêts de chacun. Mais du coup…

  • Tous ont une partie de l’information, mais très (trop) souvent cette information n’est pas centralisée. 
  • Les référentiels utilisateurs utiles à chaque équipe se multiplient et ne sont pas partagés. 
  • Tous se retrouvent à travailler sur une partie du périmètre mais pas sur sa globalité. 
  • Tous parlent de l’utilisateur comme d’une entité entière, parfois unique, alors que les utilisateurs peuvent et doivent être découpés en typologies de client différentes, et donc en besoins différents.

Dans ce cas, pourquoi est-ce que l’organisation ne s’aligne pas sur une typologie de client ?

Quand on travaille au quotidien pour ses utilisateurs, on a le sentiment de connaître ses utilisateurs et de savoir de quoi ils ont besoin. Chaque équipe maîtrise les caractéristiques utilisateurs qui les concernent. C’est un vrai sentiment ! Mais la cartographie et la connaissance des utilisateurs n’est pas partagée. 

Pourquoi dépenser de précieuses heures alors qu’on sait déjà tout ? Prendre le temps d’aligner toutes les équipes sur un projet lancé à pleine vitesse parait long, complexe, inefficace. Chaque équipe dispose des informations qui lui sont nécessaires, alors pourquoi participer à un effort commun qui semble inutile et désagréable à ce stade ? 


Mais ce fonctionnement bancal a un coût et les conséquences néfastes sont nombreuses… (pour votre produit ET vos équipes) 

  • On perd de vue l’utilisateur ainsi que ses besoins
  • Les équipes de développement sont démotivées et n’ont pas d’intérêt à produire de la valeur
  • Les développements réalisés sont peu pertinents et ne correspondent pas aux attentes
  • On perd l’engagement autour des fonctionnalités “Ce n’est pas grave si la fonctionnalité n’est pas livrée”
  • Pour atteindre de nouveaux clients qui ne correspondent pas à notre produit actuel on va forcer des features et dévaluer ainsi le produit global
  • Les changements de priorité sont fréquents
  • La priorisation est difficile voire incohérente
  • Les démonstrations n’intéressent pas ou peu les parties prenantes car on résout un faux problème
  • On crée un produit qui parle à tout le monde…mais qui ne parle à personne. Personne n’est pleinement satisfait
  • La démarche commerciale n’est pas priorisée correctement et les clients sur lesquels on concentre nos efforts ne sont pas ceux qui nous font vraiment vivre
  • Nos fonctionnalités (pourtant de valeur !) n’intéressent pas tout le monde donc on peut avoir tendance à les sous-tarifer car on manque de confiance dans leur valeur et leur légitimité.

Si vous êtes convaincus que la connaissance utilisateur est la clé de votre réussite alors regrouper vos utilisateurs autour de caractéristiques communes à toute votre organisation est primordial. En définissant et partageant ce référentiel, vous pourrez plus facilement identifier les fonctionnalités qui ont de la valeur pour vos utilisateurs. 

Comment poser facilement et durablement les bases de sa connaissance client ? 

Vous avez certainement déjà entendu parler des personas. Faire des personas c’est comprendre en profondeur les utilisateurs pour qui on veut créer des solutions et ainsi mieux les prioriser. Toutes les équipes vont s’appuyer sur ces personas pour réaliser leurs activités et notamment les équipes de développement qui vont développer des fonctionnalités à forte valeur précisément pour chaque persona. Mais les équipes peuvent également se servir de ces personas pour tester les fonctionnalités directement et récolter des retours, pour confirmer des hypothèses ou découvrir de nouveaux marchés

Les personas donnent du contexte et du sens à chaque fonctionnalité et à chaque action que l’organisation entreprend. 

Les personas sont issues d’une véritable démarche exploratoire qui va permettre de décortiquer et comprendre les besoins des utilisateurs, leurs points de douleurs, leur manière de ressentir les choses, de faire leurs choix. Cette démarche exploratoire, durable et méthodique se base sur des interviews, des entretiens qu’il faut retranscrire et analyser, des questionnaires et études d’échantillons. Réalisée par des experts : UX researchers, agences et prestataires externes, elle demande un engagement de temps et de moyens conséquents. 

Aïe, aïe, aïe. A ce stade de la lecture vous vous dites que c’est long et coûteux. 

C’est l’erreur que font la plupart des start-up ! Considérer que la démarche de définition des personas est un processus long, coûteux, opaque (autrement dit un bon vieux cycle en V…), alors que c’est une démarche qui peut tout à fait être itérative et commencer dès aujourd’hui. 

C’est LA bonne nouvelle de la journée ! Comment fait-on ?

Définissez des proto-personas. (Des quoi ?)

La différence entre persona et proto persona c’est la différence entre hypothèse et vérité

  1. Les proto-personas sont les intuitions collectives de votre organisation à propos de vos utilisateurs, autrement dit vos hypothèses de départ, formulées par rapport à vos clients actuels.
  2. Hypothèses qui seront plus tard confirmées on infirmées par votre démarche exploratoire lors de l’élaboration de vos personas

La méthode :

  • Rassembler l’ensemble des services et acteurs de votre organisation
  • Identifier les grandes suppositions et les alimenter d’exemples
  • Éviter les débats interminables, on ne cherche pas une vérité absolue
  • Cela met en lumière ce que tous partagent (ce qui doit être vrai) et ce qu’ils ne partagent pas (ce qui paraît contesté), mais aussi les questions qui restent sans réponse. Passez du temps sur ces points. 

A ce stade, doivent émerger des types d’utilisateurs et clients : ce sont vos proto-personas.

Note : il est primordial que ce travail soit animé par un facilitateur externe, ou à minima quelqu’un qui ne soit pas parti pris des différentes équipes qui s’expriment. 

Et c’est là que vous pourrez vous poser des questions stratégiques à forte valeur. 

  • Est ce que l’on parvient à catégoriser nos clients par proto-persona ? Doit-on découper à nouveau?
  • Nos découpages pré-existants respectaient-ils ces personas ou pas du tout? 
  • Quel est le proto-persona qu’on adresse le plus dans notre base d’utilisateurs actuelle? 
  •  (la question à 10.000€) Est ce que c’est vraiment ce client à qui on s’adresse le plus, avec lequel on a le plus envie de travailler ?
  • (la question à 20.000€) Si oui, est ce que la valeur produite et délivrée aujourd’hui par notre organisation est centrée sur ce proto-persona ou non ? 

Vous voyez où je veux en venir…

Commencer par des proto-personas, c’est facile, rapide, et c’est tout simplement appliquer les principes du Lean Start-up à vos personas cible. 

Vous voulez être dans une démarche d’amélioration continue dans les fonctionnalités et la valeur que vous apportez à vos clients? Il faut être dans la même démarche concernant la connaissance de vos clients et de leur besoin (qui évolue constamment).

Si vous sortez un produit parfait, c’est que vous l’avez sorti trop tard…si vous mettez 6 mois à définir et comprendre l’utilisateur parfait et son besoin, c’est que ses besoins ont déjà évolué.

Lors de notre dernier webinar, nous vous avons partagé des méthodes vous permettant de définir vos proto-personas en 2h (ou plus!).

Florent Lucas
Responsable Commercial & Marketing @thetribe