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Entrepreneuriat

De “petite start-up” à “belle scale-up”: 6 (excellents) conseils pour une start-up… à ne plus suivre pour bien scaler !

Publié le : 16 juin 2021
Temps de lecture : 7 minutes

Vous êtes en train de “scaler” : félicitations ! 

Vous avez déjà un produit créateur de valeur dont vous êtes fiers (ou pas encore complètement…).
Pour en arriver là, vous avez franchi beaucoup de belles étapes :

  • “Autour de moi tout le monde adore” ✔️ idée 
  • “FitFlex c’est avant tout une famille, on est à fond” ✔️ équipe
  • Grâce à la BPI / région / love-money / VC, on a développé notre MVP1 ✔️ produit/budget
  • “Tout le monde parle de nous / on est passé dans Good Morning Business” ✔️ traction 

Désormais, votre préoccupation est de passer à l’échelle : croître fortement sur votre marché grâce à votre produit. Le fameux product/market fit.

Le contexte n’est donc plus le même : en phase d’amorçage, l’erreur est valorisée. Si vous vous plantez, on dira que votre idée est top… mais ce n’est juste pas le bon moment. Vous serez invité dans un podcast, puis vous partirez sur autre chose…

En phase de scaling… Vous vous retrouvez face à des investisseurs qui ne misent plus sur une promesse, mais sur des résultats : des revenus, de l’engagement, l’adoption massive par des utilisateurs ciblés, un bon ratio entre votre CAC2 et votre LTV3 Le coût de vos potentielles erreurs est donc bien plus élevé.

Alors quelles sont ces “erreurs”, et comment les éviter ? Chez theTribe, on accompagne beaucoup de start-ups à ce stade de maturité, et on constate que la clé n’est plus uniquement l’idée, l’équipe ou le produit mais surtout la capacité à prendre de la hauteur, rester agile et se remettre en question.

Sommaire :

Erreur n° 1 : Features vs. Outcomes, penser “notifs push” au lieu de “conversion”

Au départ, vous avez constaté un problème business, identifié des hypothèses à valider pour prouver que votre produit répondait à ce problème (#leanstartup). Puis, pour chaque hypothèse, vous avez imaginé une fonctionnalité que vous avez intégrée à votre MVP. Et vous l’avez développé.

Vous étiez donc orientés “fonctionnalités” : l’enjeu était de prouver que le modèle est bon, créer de la traction et donner confiance.

Maintenant, vous devez passer d’un focus sur les fonctionnalités (“features”) à un focus sur les résultats (“outcomes”), pour prouver que votre produit a trouvé son marché et est en train de “scaler”.

Beaucoup de CxO viennent nous voir, leur roadmap produit sous le bras, en nous disant « la prochaine étape pour nous c’est les notifs push » ! Comme vous pouvez l’imaginer, vos investisseurs se moquent de vos notifs push ou de votre extension chrome. Si vous leur montrez que ça améliore votre conversion / diminue votre CAC, là… ça vous rend scalable, et c’est intéressant !

🔥 A ce stade, la “business value” de telle ou telle fonctionnalité n’est plus seulement sa valeur pour l’utilisateur mais sa capacité à générer de la croissance. C’est en fonction de cette dernière qu’on doit prioriser.

Erreur n° 2 : Transformer son “backlog MVP” en “backlog V2” 

Quand on accompagne une start-up “seed”, on dit souvent la fameuse phrase : si tu es fier de lancer ton produit, c’est que tu l’as lancé trop tard… Quand on développe son 1er produit, on apprend, on découvre des choses qu’on n’avait pas anticipé, et on doit faire des choix dans un budget (très) contraint. Généralement, c’est le périmètre fonctionnel qui s’ajuste, et c’est sain.

On se retrouve alors avec un backlog4 long comme le bras (l’avant-bras pour les plus chanceux) avant même d’y intégrer les 1ers feedbacks utilisateurs. La V2 consiste trop souvent à l’addition de ces 2 “backlogs”. Un conseil : faites le deuil de votre “backlog MVP” ! Votre MVP servait à prouver que votre modèle fonctionne en partant de zéro.

Maintenant, vous avez… des utilisateurs ! Votre produit répond donc déjà à un problème, l’objectif est maintenant qu’il profite à un maximum de personnes et de rendre ce modèle pérenne.

🔥 Faites le deuil des fonctionnalités que vous aviez mises de côté pour le MVP et passez à l’étape supérieure en vous focalisant sur ce qui va améliorer les indicateurs business. Approfondissez votre produit existant (vision “verticale”) au lieu d’élargir le périmètre avec des nouvelles briques (vision “horizontale”). Double effet kisscool : c’est aussi souvent moins coûteux en temps de développement !

Le Vision Sprint permet de déterminer ce qui est essentiel pour votre produit en fonction de votre contexte, pour accélérer et optimiser les prochaines étapes. 
👉 Découvrez cette méthodologie dans notre guide dédié.

Erreur n° 3 : (N’)écouter (que) ses utilisateurs 🙂

En phase d’amorçage, on passe son temps à faire la navette entre le produit et ses 1ers utilisateurs (normalement !). Au stade où vous en êtes désormais, vous avez donc un atout extrêmement fort que vous n’aviez pas avant : la capacité à accumuler de la connaissance utilisateur.

Evidemment, c’est le graal, c‘est votre force, c’est là-dessus que vous devez capitaliser. Cette connaissance utilisateur va orienter votre “discovery5”, et vous permettre de découvrir où vous pouvez générer davantage de valeur et alimenter votre croissance, au-delà d’une simple réponse “fonctionnelle” à un problème.

Servez-vous donc intelligemment de cette connaissance utilisateur, sans en faire votre “étoile polaire”. Gardez en tête que votre objectif du moment est de croître, pour atteindre le “product/market fit”.

Exemple : FrontApp avait été assez précurseure en rendant publique sa roadmap produit : les utilisateurs avaient priorisé très tôt des briques comme l’analytics ou la data retention sans pour autant que ce soit intégré d’emblée à la “vraie” roadmap : leur roadmap publique a toujours été un précieux input… mais juste un input !

🔥 Ne confondez pas le fait de “connaître vos utilisateurs” avec le fait de tenir compte de leur retours aveuglément. En bref, en phase de changement d’échelle, soyez “user-informed”, et non “user-driven” (nouveau concept !).

Erreur n° 4 : (ne) croire (qu’)en son produit

Vous venez de prouver que votre combo idée/équipe/produit a un potentiel énorme. C’est bien… mais ça ne suffit pas. Vous passez maintenant d’un mode “survie” à un mode “conquête”. Vous devez donc travailler autour de votre produit pour qu’il rencontre son marché : toujours le fameux #productmarketfit.

1/ Commencez par le début : l’acquisition, y compris hors ligne. Testez vos messages/canaux/cibles/temporalités, segmentez, analysez et testez encore : ads, A/B testing, produits de lead generation, porte-à-porte-dans-le-respect-des-gestes-barrières…

2/ Réfléchissez à un side-product simple et gratuit qui permet d’apporter de la valeur à votre cible privilégiée, vous faire connaître puis lui pousser votre produit-coeur. Ex : Spendesk a développé un outil gratuit destiné aux DAF, pour récupérer automatiquement les factures depuis les BO des outils saas #smart.

3/ Repensez vos personas, ils ont évolué en même temps que vous : ceux que vous visiez au départ, ceux que vous avez découvert en cours de route, ceux qui génèrent du CA, ceux qui ont le mérite d’exister mais vous prennent un temps fou 😅… Demandez-vous :
Est-ce qu’on travaille bien avec les clients avec qui on a envie de travailler ?
Est-ce que toutes nos équipes sont alignées sur notre vision persona ?

4/ Enfin, si vous êtes plutôt dans une optique série B, demandez-vous quelle place vous laissez à l’innovation comme relais potentiel de croissance. Vous autorisez-vous à lancer des PoC sur des side-business pour aller plus loin dans les tests, avec le risque de défocaliser les équipes « coeur » ?

🔥 Ne pensez jamais que votre produit suffit pour scaler. Vous devez maintenant le valoriser, communiquer, tester sans cesse, innover…

Erreur n° 5 : trop regarder les autres… et pas assez soi-même

Au début de l’aventure, tout le monde touchait à tout : “ah ouais non mais avec Xav’ on passait nos nuits à tout reprendre à la mano, c’était un truc de dingue, ah la la on en a bu des litres de café”.

La responsabilité du produit était répartie entre le CEO, le CTO et les équipes métiers ou CSM. Quand vous y repensez, vous vous dites qu’à l’époque vous n’aviez même pas d’équipe produit. En fait, vous étiez l’équipe produit ! Vous étiez extrêmement efficaces et agiles : l’information circulait très vite, souvent à l’oral, vous aviez très peu d’outils dont… une feuille, un stylo et quelques spreadsheets.

Puis vous avez grandi, recruté vos “chief marketing/sales/product officers”, et les équipes se sont auto-organisées. Bémol : votre organisation est segmentée, vos problématiques sont plus complexes, vous voyez apparaître les premières frictions côté ops, et ça vous ralentit.

On peut alors être tenté de continuer à recruter beaucoup :

  • des profils juniors pour tenir le rythme et rattraper le concurrent : “ils ont 6 mois de moins et sont 10 de plus, c’est pas normal
  • des profils séniors qui apportent leur expérience et remettent à plat les aspects produits

Attention : la clé ici est de garder ce qui marche : focalisez-vous sur les vrais problèmes, soyez “lean”, mettez en place des outils internes simples (ex : no-code) pour mieux travailler sans tout changer. Gardez cette forte culture agile (rythme soutenable, motivation, qualité…) car c’est ce que vos salariés sont venus chercher.

Attention enfin au danger du “scaled agile”, où en scalant on perd de vue… l’utilisateur ! Au contraire, vos utilisateurs doivent rester au centre de votre organisation/vision.

🔥 Scaler c’est croître sans faire exploser ses coûts : avant de recruter pour absorber la charge, pensez d’abord à clarifier/optimiser vos processus, et à aligner votre organisation autour de votre connaissance utilisateur.

Erreur n° 6 : trop se regarder soi-même… et pas assez les autres

Pour aborder votre série A ou B, dites-vous que votre produit ne suffit plus… et que vous ne vous suffisez plus non plus !

Évaluez vos compétences de manière neutre, et demandez-vous sur quels aspects vous avez besoin de progresser en allant chercher des expertises ailleurs (soit en recrutant, soit en externalisant).

start-up
start-up

🔥 Challenger régulièrement les expertises de ses équipes afin d’identifier les besoins à combler pour continuer à grandir sur des bases saines.

Conclusion

Ces “erreurs” sont celles qu’on a pu constater auprès des start-ups qu’on accompagne. Les réponses sont évidemment très spécifiques à chaque organisation, et souvent complexes à définir et mettre en œuvre.

Bonne nouvelle : la particularité de cette phase de scaling par rapport à l’amorçage, c’est le temps long. Une levée de fonds en série A ou B prend beaucoup de temps : mettez-le à profit pour analyser ces sujets un à un, de manière méthodique, parlez-en autour de vous, faites appel à votre réseau.

Enfin, restez agiles, et testez beaucoup !

NB : on s’est focalisé dans cet article sur ce qu’on connaît : les aspects “product”. Pour ce qui touche à la recherche de financement, on vous conseille des plateformes comme eldorado.co où vous trouverez toutes les infos utiles !


1 Minimum Viable Product = 1ère version d’un produit conçue dans le but d’obtenir un maximum de retours avec un minimum d’effort

2 Coût d’Acquisition Client = le coût moyen associé à l’acquisition d’un nouveau client (campagnes mktg, ads, etc.)

3 LifeTime Value = somme des revenus générés par un utilisateur payant

4 Backlog = désigne la liste des fonctionnalités non-développées d’un produit, priorisées en fonction de leur valeur ajoutée. Le backlog évolue tout au long de la vie du produit.

5 Discovery = l’ensemble des activités visant à “découvrir la valeur” : recherche utilisateur, collecte et analyse de données, focus group, observations sur le terrain, veille concurrentielle, “smoke tests”… Par opposition au “delivery” qui consiste à… délivrer de la valeur.

Ambroise Perrachon
Product Manager & COO @theTribe