Cap sur l’innovation ! Le Design Thinking entend bien bousculer le processus de conception d’un produit et, au-delà, l’organisation même du travail en entreprise. Et comme il n’est pas forcément évident de comprendre ce concept un peu complexe, on vous aide à y voir plus clair.
Une méthode d’innovation… mais pas que !
Ce n’est ni tout à fait une méthode, ni tout à fait une vision… C’est en fait un savant mélange des deux. Ce n’est pas clair ? Pour faire simple (et court), le Design Thinking est une approche centrée sur l’utilisateur et tournée vers l’innovation. Grosso modo, c’est un mindset qui influe sur l’organisation du travail, le management et la façon de mener un projet. Il s’agit d’adopter la boîte à outils et la démarche des designers pour gérer un projet en mode agile et créatif.
L’objectif, quant à lui, est plus clair : réaliser des produits ou des services « désirables par le consommateur, même s’il n’aurait jamais exprimé clairement un tel vœu, réalisables techniquement et viables économiquement » (Véronique Hillen, doyenne à la Paris-Est d.school et directrice du département Génie industriel à l’École des Ponts).
Pour appliquer cette méthodologie de l’innovation, les mots d’ordre sont multiples : co-créativité, empathie, intelligence collective, itération et droit à l’erreur. Le tout en remettant toujours les utilisateurs au cœur du processus de création, afin d’apporter des solutions aux problèmes qu’ils rencontrent.
Le Design Thinking, au même titre que la méthode Lean Startup, apparaît ainsi comme un mode de pensée disruptif, qui bouscule l’organisation linéaire classique en entreprise. La prise de risque est désormais autorisée, et le tâtonnement conseillé. Le but ? “Échouer tôt, pour réussir plus vite” – Tim Brown (IDEO).
L’histoire du Design Thinking : des années 50 à aujourd’hui
Le Design Thinking n’est pas un concept récent. Il date des années 50 et sa définition a bien évolué au fil des années, grâce à des chercheurs venus enrichir la méthodologie. Retour sur les grandes dates qui ont marqué l’histoire de cette pensée :
- Années 50 : Le publicitaire américain Alex Osborn popularise la technique du brainstorming, qui introduit la pensée créative en entreprise.
- 1969 : L’économiste et sociologue Herbert A. Simon fait du design une manière de penser dans son ouvrage “The Science of Artificial”. Il y pose les bases d’un mode de résolution des problèmes qui allie créativité et ingénierie.
- 1987 : Peter Rowe publie son ouvrage “Design Thinking”.
- 1991 : David Kelley crée l’agence IDEO, où il applique la démarche de pensée design au business.
- Années 90 et 2000 : Le Design Thinking devient un “état d’esprit” à part entière, notamment lorsque Tom Brown, l’actuel CEO de IDEO, popularise le terme en 1999. La méthodologie se diffuse petit à petit, d’abord aux USA puis en Europe. Les colloques, cours et publications se multiplient.
- 2010 : À partir de cette année-là, l’approche gagne du terrain en France, notamment grâce à la traduction de l’ouvrage de Tim Brown : “Change By Design ».
- 2012 : Création de 3 écoles de Design Thinking à Paris, à Pékin, et à Tokyo.
Les principes du Design Thinking
Si le concept peut paraître un tantinet nébuleux pour certains, et qu’il existe plusieurs façons d’appliquer cette méthodologie, le Design Thinking s’articule tout de même autour de plusieurs principes qui en constituent le socle :
- Une logique de co-création : Le Design Thinking a pour vocation d’encourager la collaboration entre les ingénieurs, les professionnels du marketing et les créatifs. Le but ? Tirer parti de l’intelligence collective en mettant en commun toutes les compétences.
- L’usage avant tout : Plus question de développer des produits qui n’ont aucun intérêt pour les utilisateurs. Avec le Design Thinking, tout part d’un besoin réel et se concentre sur l’humain, ses attentes, son environnement…
- L’expérience pour valider ses hypothèses : La meilleure manière de valider son idée, c’est de la lancer directement sur le marché. C’est d’ailleurs le principe du MVP, qui “permet à une équipe de récolter un maximum d’apprentissages validés à propos de ses clients en un minimum d’effort.” (Eric Ries, The Lean Startup). Une méthode idéale pour développer un produit qui soit en adéquation avec ses utilisateurs. Elle laisse également place à l’erreur et le tâtonnement.
- L’imagination au cœur de l’approche : Inutile de se limiter, mais plutôt de penser loin, fou, grand. La créativité est un pilier du Design Thinking, qui entend bien détruire les œillères que l’on se met pour stimuler l’imagination.
L’évolution constante du produit : Un produit n’est jamais figé. Parce qu’il est utilisé par des individus qui sont en constante évolution, il doit s’adapter à eux et répondre à leurs besoins. Le Design Thinking est justement dans une optique d’amélioration continue du produit, pour être au plus proche des utilisateurs.
Les grandes étapes du Design Thinking
Maintenant que le concept paraît un peu plus clair, attardons-nous sur la mise en application concrète du Design Thinking. Comment adopter cette approche de l’innovation ? Eh bien, là encore, les choses se compliquent. Car il n’y a pas qu’une seule méthode de Design Thinking… mais plusieurs. En 7, 5 ou 3 étapes : faisons le point sur ces dernières.
👉 Les 7 étapes d’après Rolf Faste
C’est l’un des précurseurs du Design Thinking. Rolf Faste, directeur de la section design product de l’université de Stanford, a énuméré les 7 étapes suivantes :
1. Définir : Il s’agit de repérer et d’identifier le problème, ainsi que le projet qui serait susceptible de le régler.
2. Rechercher : La seconde étape consiste à réunir l’ensemble de l’équipe (designers, experts en marketing, développeurs, etc.) et d’aligner les connaissances de tout le monde sur le projet. Il faudra se mettre d’accord sur la problématique et réfléchir à de potentielles pistes pour la résoudre.
3. Imaginer : C’est une phase de brainstorming où chacun donne ses idées et partage ses connaissances.
4. Prototyper : À ce stade, il est question d’élaborer des premiers prototypes, tout en continuant à croiser les idées et à les affiner.
5. Sélectionner : Les différents participants sélectionnent la meilleure idée parmi toutes celles qui ont été proposées.
6. Implémenter : Il est temps de réaliser un plan d’action et de déterminer quelles sont les ressources nécessaires (financières et humaines) pour mettre en place le projet.
7. Apprendre : La dernière étape consiste à recevoir des feedbacks du client, afin de savoir si le produit répond à ses attentes, et le faire évoluer si besoin.
👉 Les 5 étapes d’après la D-School
L’université de Stanford, quant à elle, a réduit le nombre d’étapes à 5 seulement, en ajoutant en première phase l’empathie. Il s’agit de se mettre à la place des utilisateurs pour comprendre leurs besoins. Pour cela, il faut partir à leur rencontre en réalisant par exemple des Focus Group ou bien des entretiens. Les Proto-Personas permettent également de se glisser dans la peau de ses clients.
Quant aux étapes suivantes, elles sont un condensé de celles proposées par Rolf Faste :
1. L’empathie
2. La définition
3. L’idéation
4. Les prototypes
5. Les tests
👉 Les 3 étapes d’après Tim Brown
De son côté, Tim Brown propose une autre méthode en trois étapes seulement :
1. Inspiration : Identifier le problème, trouver la problématique et des pistes de solutions pour le résoudre. C’est la phase d’étude ethnographique.
2. Idéation : La deuxième phase a pour objectif de réunir tout le monde pour générer ensemble des idées, les développer et les tester (brainstorming, utilisation de visuels, premiers prototypes…).
3. Implémentation : C’est la mise en application du projet, c’est-à-dire tout ce qui mène à sa conception ou sa fabrication.